Loi 31/3/'10: relative à l'indemnisation des dommages résultant de soins de santé

Suite aux nombreuses critiques formulées vis-à-vis de la loi du 15 mai 2007 relative à l’indemnisation des dommages résultant de soins de santé, une nouvelle loi a été votée. 

C’est à présent la loi du 31 mars 2010 relative à l’indemnisation des dommages résultant de soins de santé qui, en abrogeant la loi du 15 mai 2007, organise ce nouveau système d’indemnisation. 

Concernant l’entrée en vigueur de cette nouvelle loi, il faut se référer à son article 35 qui dispose :
« § 1er. Sauf en ce qui concerne le présent article et les articles 1er, 6, 7, 9, 10, 11, 33 et 34, le Roi détermine la date d'entrée en vigueur de la présente loi.
§ 2. La présente loi s'applique aux dommages résultant d'un fait postérieur à sa publication au Moniteur belge. » 

Le nouveau système d’indemnisation entrera donc en vigueur à une date déterminée par le Roi. Cependant, les articles concernant la création du Fonds des accidents médicaux sont déjà entrés en vigueur. 

I. Innovations de la loi du 31 mars 2010 

La loi du 31 mars 2010 tente de répondre aux reproches qui avaient été formulés à l’encontre de la précédente loi. La principale innovation est l’organisation d’un système d’indemnisation à deux voies. La victime a le choix d’être indemnisée devant les tribunaux ou devant le Fonds des accidents médicaux créé par la loi. 

Une autre innovation est le remplacement des notions de faute et d’aléa thérapeutique par celles de « fait engageant la responsabilité » et d’« accident médical sans responsabilité ». La loi du 31 mars 2010 définit en effet le dommage résultant de soins de santé comme « le dommage qui trouve sa cause dans une prestations de soins de santé et qui découle :
a)soit d’un fait engageant la responsabilité d’un prestataires de soins ;
b)soit d’un accident médical sans responsabilité. » 

L’accident médical sans responsabilité est « un accident lié à une prestation de soins de santé, qui n’engage pas la responsabilité d’un prestataire de soins, qui ne résulte pas de l’état du patient et qui entraîne pour le patient un dommage anormal. » La loi précise également que l’échec thérapeutique et l’erreur non fautive de diagnostic ne constituent pas un accident médical sans responsabilité. 

Enfin, contrairement à ce que prévoyait la loi de 2007, la nouvelle loi relative à l’indemnisation des dommages résultant de soins de santé prévoit que l’indemnisation devra être intégrale, c'est-à-dire qu’aucun plafond ni franchise n’est prévu. 

II. Les missions du Fonds 

Alors que pour être indemnisée, la victime devait auparavant prouver la faute du prestataire de soins, son dommage et le lien de causalité, la victime d’un accident médical sans responsabilité peut dorénavant être indemnisée du dommage anormal subi lors de la prestation de soins de santé dispensée par un prestataire de soins sans devoir apporter de telles preuves. 

Le dommage est considéré comme anormal « lorsqu’il n’aurait pas dû se produire compte tenu de l’état actuel de la science, de l’état du patient et de son évolution objectivement prévisible. » Et pour pouvoir être indemnisé par le Fonds, le dommage devra être suffisamment grave, c'est-à-dire remplir une de ces quatre conditions:
« 1° le patient subit une invalidité permanente d’un taux égal ou supérieur à 25% ;
2° le patient subit une incapacité temporaire de travail au moins durant six mois consécutifs ou six mois non consécutifs sur une période de douze mois ;
3° le dommage occasionne des troubles particulièrement graves, y compris d’ordre économique, dans les conditions d’existence du patient ;
4° le patient est décédé. » 

Notons que la loi exclut de son champ d’application les dommages résultant d’une expérimentation au sens de la loi du 7 mai 2004 relative aux expérimentations sur la personne humaine et ceux résultant d’une prestation de soins de santé accomplie dans un but esthétique non remboursable en vertu de la loi relative à l’assurance obligatoire soins de santé et indemnités, coordonnée le 14 juillet 1994. 

Le Fonds n’a pas comme unique mission d’indemniser les dommages trouvant leur cause dans un accident médical sans responsabilité comme expliqué ci-dessus. L’article 4 de la loi prévoit également qu’il indemnise la victime lorsque le dommage trouve sa cause dans un fait engageant la responsabilité d’un prestataires de soins, dont la responsabilité civile n’est pas ou pas suffisamment couverte par un contrat d’assurance (2°), ou lorsque le dommage trouve sa cause dans un fait engageant la responsabilité d’un prestataire de soins et que celui-ci ou son assureur conteste la responsabilité (3°), ou encore lorsque l’assureur couvrant la responsabilité du prestataire de soins qui a causé le dommage formule une offre d’indemnisation que le Fonds juge manifestement insuffisante (4°). 

Dans ces cas, le Fonds indemnisera la victime et sera subrogé dans les droits de cette dernière pour se faire rembourser par le prestataire de soins ou son assureur. 

III. Procédure devant le Fonds 

Toute personne qui s’estime victime d’un dommage résultant de soins de santé (ou ses ayants droit) peut adresser au Fonds, par lettre recommandée à la poste, une demande d’avis sur la responsabilité éventuelle d’un prestataire de soins dans le dommage subi, ainsi que sur la gravité de celui-ci. 

Pour être recevable, la demande doit être adressée au Fonds dans les cinq ans à partir du jour qui suit celui où le demandeur a eu connaissance du dommage ou de son aggravation et de l’identité de la personne à l’origine du dommage. En tout état de cause, la demande devra être adressée au Fonds dans les vingt ans à partir du jour qui suit celui où s’est produit le fait qui a causé le dommage. 

Pour que la demande soit recevable, le demandeur ne doit pas avoir accepté pour le même dommage une offre d’indemnisation définitive ou déjà avoir été indemnisé du dommage par le Fonds ou en vertu d’une décision judiciaire coulée en force de chose jugée. La demande ne sera pas non plus recevable si une décision judiciaire coulée en force de chose jugée a déclaré non fondée la demande d’indemnisation du dommage. 

La procédure devant le Fonds est gratuite pour le demandeur et les parties peuvent se faire assister par la personne de leur choix. 

IV. Avis et offre du Fonds 

Dans les six mois de la réception de la demande, le Fonds indique, dans un avis motivé, s’il estime que le dommage résultant de soins de santé trouve l’une de ses causes dans la responsabilité d’un ou de plusieurs prestataires de soins (il indique si la responsabilité de ce prestataire ou de ces prestataires est couverte par un contrat d’assurance de responsabilité et si c’est le cas invite dans la notification de l’avis l’assureur à formuler une offre d’indemnisation), ou dans un accident médical sans responsabilité (le Fonds indique si le dommage présente le seuil de gravité nécessaire), ou encore qu’il ne relève d’aucune de ces catégories. 

Lorsque l’avis conclu qu’il y a lieu à indemnisation, le Fonds, dans les trois mois de la notification de l’avis, adresse au demandeur, sous pli recommandé à la poste, une offre d’indemnisation que ce dernier peut accepter ou non. Si la victime refuse l’offre, elle peut porter la contestation devant le tribunal dans ce délai de trois mois. 

Si le dommage peut être quantifié, l’offre indique un montant définitif. Si ce n’est pas le cas, l’indemnisation est provisionnelle tenant compte des frais déjà exposés, de la nature des lésions, de la douleur endurée et du préjudice résultant des périodes d’incapacités et d’invalidités déjà écoulées. L’indemnisation provisionnelle porte également sur le préjudice le plus probable pour l’avenir. Dans ce cas, le demandeur adresse une demande complémentaire au Fonds lorsque le dommage peut être entièrement quantifié ou lorsque celui-ci a évolué de manière significative.


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