Europe et le financement des hôpitaux: Cour 7 novembre 2012 (Plainte déposée par la CBI concernant le financement des hôpitaux IRIS)

L’association des hôpitaux bruxelloise CBI (Coordination Bruxelloise d’institutions sociales et de santé) estimait que les hôpitaux IRIS avaient reçu une aide d’Etat interdite. Plus particulièrement, les hôpitaux ont reçu une aide financière, entre autres, via la sous-partie B8 (financement pour des hôpitaux avec un profil de patients démunis au niveau socio-économique) du budget hospitalier et par des mesures de la Région Bruxelles-Capitale. La Commission européenne a analysé l’affaire et a considéré que les mesures constituaient une aide d’Etat. La Commission a alors examiné si l’aide pouvait être justifiée sur base de l’art. 86, paragraphe 2 du traité CE (devenu art. 106, paragraphe 2, TFUE). Conformément à l’art. 86 paragraphe 2 du traité CE, les entreprises chargées de la gestion de services d’intérêt économique général sont soumises aux règles du Traité, dans les limites où l'application de ces règles ne fait pas échec à l'accomplissement en droit ou en fait de la mission particulière qui leur a été impartie. La Commission européenne a estimé que l’aide financière ne violait pas l’art. 86, paragraphe 2 du traité CE (Décision C (2009) 8120 de la Commission du 28 octobre 2009 sur l’aide NN 54/09).

La CBI a cependant interjeté appel contre cette décision. La CBI estimait que la Commission aurait dû avoir des doutes sérieux concernant la question de savoir si l’aide examinée – vu les critères pour l’application de l’art. 86, paragraphe 2 du traité CE – était compatible avec le marché intérieur. Il ressort de l'arrêt Altmark que la compensation des prestations pour l’exécution des obligations de service public ne constitue pas une aide d'État s’il est satisfait aux conditions suivantes:

- Le bénéficiaire doit effectivement être chargé de l’exécution d’obligations de service public et ces obligations doivent être clairement définies; 

- Les paramètres sur la base desquels est calculée la compensation doivent être préalablement établis de façon objective et transparente;

- La compensation ne dépasse pas ce qui est nécessaire pour couvrir les coûts occasionnés des obligations de service public, en tenant compte des recettes y relatives ainsi que d’un bénéfice raisonnable pour l’exécution de ces obligations;

- Lorsque le choix de l’entreprise à charger de l’exécution d’obligations de service public n’est pas effectué dans le cadre d’une procédure de marché public, le niveau de la compensation nécessaire doit être déterminé sur la base d’une analyse des coûts qu’une entreprise moyenne bien gérée aurait supportés pour exécuter ces obligations, en tenant compte des recettes y relatives ainsi qu’un bénéfice raisonnable pour l’exécution de ces obligations.

Le Tribunal a annulé la décision de la Commission dans un arrêt du 7 novembre 2012 (Tribunal, 7 novembre 2012, T – 137/10). Le Tribunal a donc considéré qu’il existait des doutes sérieux quant à la compatibilité de l’aide financière examinée accordée aux hôpitaux IRIS avec le marché intérieur au regard du critère pour l’application de l’art. 86, paragraphe 2, du traité CE. La CBI a en effet indiqué que la Commission n’avait pas pleinement analysé les paramètres de financement par la Région Bruxelles-Capitale. Le Tribunal est arrivé à la conclusion que les arguments de la CBI témoignaient de l’existence d’un doute quant à savoir si le financement par la Région Bruxelles-Capitale examiné répondait bien aux paramètres de compensation préalablement établis. Le Tribunal a également jugé que la Commission ne réussissait pas à dissiper le doute invoqué par la CBI sur la compatibilité avec le marché intérieur du financement des hôpitaux IRIS par la Région Bruxelles-Capitale au regard du critère tiré de l’existence de modalités permettant d’éviter la surcompensation et de s’assurer de son remboursement.

La décision du 7 novembre 2012 indique clairement qu’on regarde de plus en plus au niveau européen, la façon dont les hôpitaux reçoivent leur financement. Ce phénomène sera plus important encore en tenant compte de l’application de la décision de la Commission sur les hôpitaux du 21 décembre 2011 relative à l’application de l’article 106, paragraphe 2, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne aux aides d’Etat sous forme de compensations de service public octroyées à certaines entreprises chargées de la gestion de services d’intérêt économique général.

La Cour constitution-nelle juge l’interdiction de la publicité de chirurgie esthétique inconstitu-tionnelle

Dans un arrêt du 22 mai 2013, la Cour constitutionnelle a annulé la loi du 6 juillet 2011 pour violation des articles 10 et 11 de la Constitution.

La loi du 6 juillet 2011 en interdisant la publicité et en réglementant l’information des actes d’esthétique médicale voulait combattre les abus en matière de médecine esthétique - en particulier la publicité racoleuse - en prévoyant une interdiction totale de publicité des actes d’esthétique médicale. La notion de «publicité» a été définie de manière large comme «toute forme de communication ou action qui vise, directement ou indirectement, à promouvoir les actes d’esthétique médicale, quels que soient l’endroit, le support ou les techniques utilisés, y compris les émissions de télé-réalité». Les informations personnelles concernant les actes étaient encore autorisées mais sous certaines conditions.

La loi s’appliquait aux «actes d’esthétique médicale», à savoir «tout acte posé par un médecin visant à modifier l’apparence corporelle d’une personne, à sa demande, pour des raisons esthétiques, sans but thérapeutique ni reconstructeur. Les injections ainsi que les traitements aux lasers classe IV et à l’IPL sont également concernés». Ainsi, la loi visait donc uniquement les actes médicaux. Or, les médecins ne sont certainement pas les seules personnes pouvant effectuer des actes esthétiques. D’autres personnes – notamment les esthéticiens – peuvent également effectuer certains actes visés par la loi attaquée comme par exemple les injections et les traitements au laser. La loi a cependant uniquement interdit la publicité relative aux actes médicaux d’esthétique médicale, et non la publicité d’autres personnes qui faisaient des actes similaires. La Cour a jugé que c’était contraire au principe d’égalité repris aux articles 10 et 11 de la Constitution. La Cour a annulé la loi du 6 juillet 2011 en sa totalité.

Entretemps, le législateur a adopté la loi du 23 mai 2013 réglementant les qualifications requises pour poser des actes de médecine esthétique non chirurgicale et de chirurgie esthétique. Les titulaires d’un titre professionnel particulier de «médecin spécialiste en chirurgie plastique, reconstructive et esthétique» ou de «médecin spécialiste en chirurgie» sont les seuls habilités à réaliser l’ensemble des actes relevant de la médecine esthétique non chirurgicale et de la chirurgie esthétique. Les actes d’esthétique médicale sont désormais réservés aux médecins possédant les qualifications nommées ci-dessus, à l’exception des esthéticiens qui possèdent les qualifications professionnelles prévues par le Roi et qui sont autorisés à effectuer certaines techniques d’épilation par laser ou par lumière pulsée intense s’ils ont suivi une formation prévue par le Roi.

Cadre légal: biobanques – utilisation du matériel corporel humain à des fins scientifiques

La loi du 19 mars 2013 portant des dispositions diverses en matière de santé (I) a apporté aux biobanques le cadre légal tant attendu. Il faudra cependant encore attendre un arrêté royal pour que ces nouvelles règles entrent en vigueur. 

La biobanque est définie comme la structure qui, à des fins de recherche scientifique, à l’exception de la recherche avec des applications médicales humaines, obtient, le cas échéant traite, stocke et met à disposition du matériel corporel humain, ainsi que, le cas échéant, les données relatives au matériel corporel humain et au donneur qui y sont liées. 

La biobanque est destinée au stockage et à la mise à disposition du matériel corporel humain à des fins scientifiques (à l’exclusion des applications humaines). De ce fait, une réglementation adaptée, moins restrictive est indiquée, afin de préserver et promouvoir l’accès à la recherche scientifique et le développement de techniques innovantes. 

Si les autres structures souhaitent effectuer des opérations avec du matériel corporel humain à des fins scientifiques, elles devront également se notifier comme biobanque. 

La nouvelle loi donne une importance particulière au choix du donneur vivant concernant la traçabilité du matériel corporel humain. En choisissant que le matériel corporel humain donné soit tracé, le donneur vivant pourra ainsi décider d’être informé d’éventuelles informations pertinentes relatives à son état de santé qui seront révélées par la recherche. 

En cas de donneur décédé ou s’il s’agit de matériel résiduel, la décision relative à la traçabilité du matériel sera prise par la personne qui fournit le matériel corporel humain à la biobanque, à savoir par exemple le gestionnaire de l’établissement, le médecin du laboratoire ou encore le médecin en chef de l’hôpital.

Une nouveauté concerne également le lieu de prélèvement du matériel. Si le matériel est destiné à être utilisé à des fins scientifiques, le prélèvement pourra avoir lieu en dehors d’un hôpital sous la responsabilité d’un médecin, sauf s’il s’agit d’un donneur décédé. Le matériel pourra ensuite directement être transféré à la biobanque sans passer par une banque. 


Copyright 2017 Callens-Law -  Sitemap